Solidaires sur la glace : les paramédics unis pour La Vigile

Du 25 au 27 avril 2025, les paramédics du Québec ont troqué leur uniforme pour l’équipement de hockey à l’occasion d’un tournoi amical, mais porteur de sens. L’événement, organisé au profit de l’organisme La Vigile, qui soutient les premiers répondants – notamment ceux du milieu préhospitalier d’urgence – confrontés à des problématiques de santé mentale. Demers Ambulances est fière d’avoir appuyé ce projet.

Au-delà de la compétition sur la glace, l’initiative mettait de l’avant l’importance de la solidarité, de l’esprit d’équipe et surtout, du mieux-être psychologique de celles et ceux qui, chaque jour, se dévouent pour les autres. Car même les sauveurs ont parfois besoin d’être sauvés. Lever le voile sur cette réalité contribue à briser les tabous encore trop présents autour de la santé psychologique dans les milieux d’intervention d’urgence.

« Plus on parle de normaliser la demande d’aide et ce qu’une personne peut ressentir à la suite d’interventions difficiles répétées, moins ceux qui en ont besoin craindront d’être jugés », souligne Geneviève Arguin, directrice générale de La Vigile. Elle rappelle que de rechercher du soutien relève du courage, et non de la faiblesse.

Selon elle, bien que des efforts considérables soient faits par les services paramédicaux pour déstigmatiser ces enjeux, il reste du chemin à faire. Heureusement, les mentalités évoluent : « C’est un sujet de plus en plus abordé durant la formation académique des paramédics et dans les organisations. On note un changement progressif. L’âge moyen des personnes qui utilisent nos services est de 43 ans, ce qui montre que les gens viennent chercher de l’aide de plus en plus tôt dans leur parcours. »

L’humain derrière l’uniforme

Le métier de paramédic est reconnu pour être physiquement exigeant, mais aussi pour sa lourde charge émotionnelle. « C’est une profession qui n’est pas facile sur le long terme. Des carrières de 35 ou 40 ans, on va peut-être en voir de moins en moins », note Sarah Bourget, conseillère-cadre en Santé, Mieux-Être chez Paraxion et chercheuse dans le milieu universitaire sur la santé mentale des paramédics.

Elle rappelle que chaque professionnel vit les situations potentiellement traumatisantes à sa manière. « Au fil du temps, on gagne de l’expérience, mais c’est aussi un couteau à double tranchant. L’exposition répétée à des événements potentiellement traumatiques peut avoir une incidence directe sur la santé mentale, pas seulement sous forme de trouble de stress post-traumatique, mais aussi de dépression, d’anxiété, d’idéations suicidaire ou de troubles liés à l’usage de substances. »

 

La Vigile offre du soutien sur tous ces fronts, notamment grâce à un réseau de professionnels externes qui comprennent la réalité terrain des paramédics. Le parcours commence généralement par un appel à la ligne d’aide 24/7, qui permet d’obtenir un premier soutien. Un suivi peut ensuite être amorcé dans le milieu de vie, et au besoin, un séjour interne est proposé dans le cadre des programmes Dépendance ou Répit.

Le manque de connaissance sur les services disponibles, la crainte du jugement, et des inquiétudes concernant la confidentialité peuvent toutefois freiner les paramédics. « Il y en a qui veulent gérer ça seuls. Mais on peut les accompagner, les informer. Il y a encore beaucoup de questions : Comment fonctionne le traitement? Est-ce que ce sera efficace? Est-ce que mon employeur saura? Est-ce que les autres vont le savoir? »

Là-dessus, Mme Arguin insiste sur le fait qu’il ne faut surtout pas hésiter à appeler La Vigile ou à leur écrire pour obtenir toutes les informations nécessaires, en réitérant la confidentialité du service. « À La Vigile, on voit concrètement la différence qu’on peut faire. Quand une personne arrive, on sent toute sa fragilité, jusque dans son corps recourbé par le poids de l’anxiété. Et quand elle repart plus droite, en disant qu’on a rallumé sa flamme intérieure, ça n’a pas de prix. »

La prévention pour le changement

Bien qu’il soit difficile d’éliminer les risques, des outils peuvent être mis en place à l’intérieur même des organisations pour mieux les prévenir, croit Mme Arguin. « Je pense aux systèmes de pairs aidants, qui permettent de détecter les signes de détresse chez un collègue ou encore des formations sur les risques psychosociaux. »

Paraxion, qui chapeautait le tournoi de hockey, a justement mis sur pied un système de pairs aidants dans le cadre de son programme de gestion des événements à potentiel traumatique qui sera déployé sous peu. « Ce sont des collègues qui portent aussi l’uniforme, formés pour accompagner et écouter. Le but, c’est d’avoir un contact humain », explique Sarah Bourget.

Mme Bourget insiste aussi sur l’importance d’accepter que les intervenants ne soient pas toujours à leur meilleur, puisqu’ils sont humains, d’abord et avant tout : « On veut que nos gens soient professionnels, alertes, performants… Mais est-ce qu’on peut aussi avoir une considération réelle pour le fait que ce n’est pas réaliste d’être à 100 % tous les jours? Même préoccupé, on peut continuer à offrir des soins de qualité. Toutefois l’important c’est de se mettre en action, par exemple prendre contact avec une personne de confiance pour en discuter ou s’informer sur les ressources disponibles pour nous aider avant que la situation ne s’aggrave. »

Ce regard plus humain sur les réalités du terrain rejoint une réflexion de plus en plus présente dans le réseau ambulancier. « Il y a plusieurs entreprises pour qui la bienveillance fait partie intégrante des valeurs organisationnelles, et pas seulement envers les patients, mais plutôt partagée par tous et envers tous. La santé mentale est une thématique émergente, appuyée aussi par les obligations légales depuis l’adoption, en 2021, de la loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST), qui inclut désormais la protection de l’intégrité psychique des travailleurs. »

Des efforts structurés et une volonté de collaboration

Sarah Bourget partage plusieurs initiatives concrètes prises dans l’industrie : « Ça fait quelques années qu’on a initié avec d’autres entreprises ambulancières, une communauté de pratique en santé et sécurité, sécurité et mieux-être. On a même lancé un sous-comité dédié à la santé mentale. On se regroupe pour réfléchir, partager nos pratiques, voir ce qui fonctionne ailleurs. Au final, on aspire tous à soutenir nos gens du mieux qu’on peut. »

Elle mentionne également son implication lors des deux derniers événements annuels de la Corporation des services d’ambulance du Québec (CSAQ), où elle a présenté des contenus liés à la santé mentale. « Il y a deux ans, j’ai présenté un projet sur les impacts psychosociaux des lésions professionnelles chez les paramédics. Et cette année, un portrait scientifique de la santé mentale des paramédics québécois, c’est un sujet qui prend de plus en plus de place. »

L’importance de l’implication du secteur

En 2024, près de 20 % des bénéficiaires des services de La Vigile étaient des paramédics, dont plusieurs ont eu recours au programme de soutien aux dépendances. Ces statistiques soulignent l’importance d’organismes comme La Vigile, qui dépendent en partie de la générosité du public pour offrir leurs services.

« Grâce à toutes les activités de collecte de fonds organisées en notre nom, comme le tournoi de hockey des paramédics, nous réussissons à amasser jusqu’à 300 000 $ par année. Ces montants sont essentiels pour poursuivre notre mission », précise Geneviève Arguin. « Et puis, la santé mentale passe aussi par l’activité physique », ajoute-t-elle avec enthousiasme.

L’implication d’une entreprise comme Demers Ambulances, en tant que partenaire du tournoi, envoie également un message fort. « Le fait qu’un fabricant d’ambulances s’implique ajoute une dimension supplémentaire. Ce n’est pas une organisation externe qui appuie une cause : c’est une entreprise qui connaît la réalité du terrain. Et ça, c’est extrêmement significatif pour notre communauté », conclut Mme Arguin.

À propos de La Vigile

La Vigile est un organisme à but non lucratif dédié à l’accompagnement psychologique des professionnels en uniforme confrontés à des enjeux de santé mentale. Services de répit, soutien aux dépendances, intervention post-traumatique : chaque année, l’équipe vient en aide à des centaines de premiers répondants à travers le Québec.

Pour en savoir plus, lire des témoignages ou faire un don : https://lavigile.qc.ca/

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